La nuit a considérablement évolué en Île de France. Les clubs sont parfois fermés administrativement par la préfecture et connaissent une forte concurrence, celle des bars, des concerts, des festivals (l’été surtout) et des collectifs (toute l’année). Les collectifs organisent des fêtes la plupart du temps dans des hangars, où on peut danser, boire et fumer jusqu’au lendemain. C’est eux qui cassent la baraque. Ils ont un succès populaire auprès des vingtenaires et leur créativité est indéniable. Les plus importants sont Possession, Fée Croquer, MYST et il ne faut pas oublier la Péripathe, lieu sous le périphérique à porte de Pantin, qui, depuis ses débuts connaît un sacré buzz. Officiellement restaurant « freegan », le lieu a cessé d’accueillir des afters courant 2019 et va renaître grâce à Fawa suite à un appel d’offres de la Mairie de Paris.
Aujourd’hui se développent des organisateurs qui ont l’approche libertaire des free parties sans en adopter la gratuité et le mode communautaire. Ils déclarent être persécutés par la police. Au lieu de se structurer, comme la plupart des professionnels, comme de nombreux anciens free parteux, les collectifs préfèrent payer des intermédiaires pour « éviter » la police. N’entrent ils dans un jeu incertain et risqué ? Ce schéma a été déjà hautement le cas lors du début des raves à Paris au début des années 90. Les collaborations entre orga et dealers étaient courantes, ce qui, au final, se terminait en désastre, surtout pour les publics.
C’est par une enquête minutieuse du journaliste Hollandais David Wouters publié sur son site Cadence Culture que cette information se révèle. Cet expert des musiques électroniques, intervenant à l’Amsterdam Dance Event, scrute les liens entre musique, tourisme et autres disciplines. Il a suivi le collectif MYST dans l’organisation de la fête de Myst nommée « Chapitre VI: Latex Antique.« . C’est une véritable odyssée dans l’univers des organisateurs qui « font la NUIT ». On y est ! La description des fêtes Myst permet de faire phantasmer les berlinois et londoniens sur nos fameux hangars; lieux propices aux vagabondages les plus fous.
L’étude de la plate forme de vente de tickets Shotgun révèle également quelques chiffres sur les plus gros vendeurs de tickets. Les plus gros vendeurs comptent le Rex, Concrete mais aussi Fée Croquer et Possession, le projet d’Anne Claire Gallet alias Dactylo et Mathilda von der Meersch. Le tableau des ventes de ticket ci dessus extrait de Shotgun est clair : ça cartonne. Et Boiler Room fête ses dix ans à Paris avec Possession en décembre 2021. Un symbole de réussite.
Ces organisateurs ne contribuent pas aux sociétés civiles et à la taxe sur la billetterie, pourtant des outils indispensables au développement et à l’autonomie de l’écosystème musical en France face aux majors US… Payer pour l’utilisation d’œuvres d’artistes qu’on prétend soutenir, ce n’est pas un sacrilège, d’autant plus qu’il est toujours possible de négocier l’assiette et le taux, etc. pour payer un taux adapté à la réalité de son économie. La diffusion d’œuvres d’artistes non sociétaires, de test pressings, de white labels sont des bases de négociation avec la SACEM et la SPRE (uniquement si on ne salarie pas les artistes et qu’on n’est pas affiliés au Centre National de la Musique). De son côté, la taxe sur la billetterie du CNM permet de bénéficier en N+1 de 64% des sommes versées et d’aider d’autres confrères. Bref, sous couvert d’underground, certains organisateurs refusent la solidarité avec les artistes, les confrères du secteur et tout simplement l’État, la République…
Par contre, comme chaque bonheur, surtout festif, connaît son alerte sanitaire, l’étude TREND de l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT) pondère notre enthousiasme collectif:
« Le développement d’une scène festive alternative a bouleversé les repaires. Au nom d’une certaines idéologie libertaire, la consommation de drogues (cocaïne, MDMA/ectasy et kétamine essentiellement) est en effet tolérée par les organisateurs de ces soirées d’un genre nouveau, contrairement à ce qu’il en est dans les établissements festifs commerciaux. L’OFDT observe cependant que, grâce à une bonne connaissance en matière de RdRD de la part des fêtards, les incidents liés à des surdoses y sont rares. »
Journal International de la Médecine
C’est donc le modèle à la mode désormais en Ile de France selon Trax Magazine.
Sur le sujet Tsugi a mené une enquête : « Soirées warehouse : sont-elles allées trop loin ? »
Photo: ANGST x MYST: The Devil’s Masquerade par Luc Bertrand