Invité à la Générale de ce nouveau spectacle du Théâtre du Châtelet, j’ai pu découvrir une mise en scène cosmique de l’artiste Russe Oleg Kunik, qui propose une version ambitieuse de cet opéra de Monteverdi (1610), considéré comme un des chefs d’œuvre de l’artiste, à mi chemi entre œuvre sacrée et profane.
C’est de l’art total : coffrage de la façade du théâtre, personnel d’accueil costumé, scénographie vidéo, écran géant au dessus de l’orchestre, va et viens du chœur dans la salle et les balcons, sonorisation spatiale, etc.
L’artiste invité, à la réputation sulfureuse (intervention des Douanes sur le stand de sa galerie lors de la dernière FIAC), a réalisé un travail qui séduit au début de la représentation mais lasse à la fin, parce qu’en partie inabouti et parfois maladroit dans le jeu de scène. L’interprétation musicale, du à Jean-Christophe Spinosi de l’ensemble Matheus de Brest, est de qualité, mon oreille peu musicale n’y trouve à redire. J’ai pris conseil auprès de Vincent Borel (écrivain et journaliste spécialiste du baroque), qui trouve le spectacle intéressant mais pas finalisé.
On a l’impression d’être dans une version Russe de Star Trek sur fond de baroque. Il y a un côté low tech dans l’imagerie vidéo, qui n’a pas grand chose à voir avec Bill Viola pour Tristan & Yseult à l’Opéra Bastille. Les images ont peut être été conçues sur un Goupil ou sur un Amstrad. Ce n’est pas déplaisant, mais drôle. Les costumes ont l’air d’avoir été créés par Pierre Cardin lui-même.
L’intérêt de la mise en scène de la « star » de cette pièce religieuse est dans le mouvement perpétuel, soit rétinien par les vidéos, soit dans les pérégrinations des choristes et des danseurs (un couple de danseurs genre rave transe n’arrête pas de bouger) ou, quand même, par la qualité des instrumentistes plantés sur la scène. Le chef s’agite derrière une lunette grossissante, c’est assez drôle.
Mais le scandale me diriez vous ? Le Châtelet n’invite pas un tel artiste sans arrière pensée précise : susciter l’envie du public par une énième mise en scène soit disant « tapageuse » pour aller voir une œuvre de musique religieuse. Ce n’est pas le scandale du Sacre du Printemps de 1913 aux Champs Élysées, ni Hernani de Victor Hugo, mais une belle oeuvre orchestrée par un adepte raëlien resté bloqué à une esthétique années 80.
Chapeau quand même !
Ci dessous une performance d’Oleg Kunik (source).
Les Vêpres de la Vierge au Théâtre du Châtelet, place du Châtelet (Ier).
Dates : du 24 au 29 janvier. Places : 10 à 90 €. Loc. : 01 40 28 28 40.